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FALLOUT24

Verset 12 : Solem Quis Dicere Falsum Audeat

Octobre 2128. De nombreux évènements s’étaient passés. Je vivais à Phoenix Point, bastion le plus interne de cette nouvelle cité que l’on appelait Rebirth City. Les gens, qui commençaient à avoir conscience de l’endroit dans lequel ils vivaient, disaient souvent : It's a new New York today. Tout cela était dirigé d’une volonté de fer et d’une main de maître par Python. Comme je le disais, de nombreux évènements s’étaient passés.

Lorsque nous étions retourné vers l’usine de Nuka~Cola, quelques quatre mois plus tôt, nous n’avions pas manqué de passer devant l’imposante Big Boy, la locomotive immobilisée depuis le début de la guerre sur son tronçon de voie ; la bête était endormie, mais voulait encore rugir, et Python, tombé en admiration devant elle dès le premier regard, l’avait bien compris. Il avait lui-même des desseins pour la machine. En repartant de chez les Corleone, il m’avait machinalement demandé si je pensais qu’elle pourrait encore fonctionner. Après un bref coup d’œil aux boggies, où je vis que les roues n’étaient pas soudées aux rails, principal ennui avec ces monstres restés trop longtemps sur place sous les intempéries, je lui répondis qu’avec un peu d’entretien, elle avancerait, mais que le verrou énorme semblait plus problématique. Il écouta d’une oreille distraite ma réponse, et n’attendit pas que je finisse ma phrase pour changer de sujet. Pourtant, au-delà de son attitude nonchalante, ce qu’il venait de voir était loin de le laisser indifférent.

Il nous conduisit à travers un dédale de rues, de ruines, sous un ciel gris et entre des murs fatigués. Pas encore remis de ce que nous avions vu, Mina et moi nous laissions tracter par sa motivation nouvellement retrouvée. Le surlendemain, nous arrivâmes aux abords d’un grand entrepôt. L’endroit tout de suite parut étrange. Tous les autres bâtiments aux alentours avaient été rasés, laissant une bande de vingt mètres totalement dégagée, tout autour du dépôt. Python attacha les bêtes, et nous fit signe de le suivre. « Ici, elles ne risquent rien, pas besoin de surveillance ». Il fit un ou deux signes dans le vide, puis suivit un parcours bien défini, sans hésitation. D’instinct nous marchâmes dans ses pas. Il se mit à marcher beaucoup plus lentement lorsqu’il fut à cinq mètres de la porte principale, puis y arriva après deux ou trois changements de direction. Il se dirigea vers une petite porte a côté du rideau de fer, frappa trois coups et dit d’une voix forte et assurée : « Eli, Eli, lamma sabachtani ». La porte sembla s’ouvrir toute seule. Il entra. Nous le suivîmes. Il avait déjà beaucoup avancé, marchait d’un pas ferme et rapide. Il eut la bonté de lâcher un « Lui, c’est un ami ». Je lançai un regard inquiet à Mina, qui ne semblait pas en savoir plus sur cet endroit, alors qu’elle paraissait être connue. Nous étions entouré de deux gardes en armure de combat, une sorte de version améliorée du gilet pare-balle qui avait été commercialisée par l’armée pour les civils qui voulaient aller chercher leur pain sans trop de problème le dimanche matin. Son pri x et le fait qu’il fallait attendre deux semaines pour avoir un permis avaient toutefois fait que peu de modèles avaient été achetés par des particuliers. On avait alors réservé les surplus pour l’armée et la police (réunie assez rapidement en une seule corporation en ces temps troublés). Ils avaient également des bozar, arme mortelle aussi précise que puissante, dont le tir en rafale avait dissuadé de nombreux pillards de revenir à la charge, faute d’entrailles. Dans la cour intérieure dans laquelle nous étions entré, nous pouvions voir quelques autres personnes, chacun vaquant à son occupation. S’ils n’étaient pas tous aussi puissamment équipés, ils avaient tous une armure de cuir et un pistolet à la ceinture. Il n’était pas rare de voir un fusil à lunette, d’assaut, ou à pompe en bandoulière ou a portée de main. Je couru à moitié pour rejoindre notre compagnon. Il était entré dans un préfabriqué en face de l’entrée. Au moment où je franchissais le seuil, un homme faisait de même par une autre porte de l’autre côté de la petite pièce. Il remarqua notre présence, regarda Python, qui attendait, souriant, assis à une table ; il leva un sourcil et esquissa à son tour un sourire : « Je suis ravi de voir que nos projets se concrétisent. Quel dossier ? », et Python de répondre, d’un air à la fois détaché et victorieux : « Alcatraz ».

Une semaine plus tard, une équipe de dix hommes nous accompagnait à la locomotive, avec un chargement de rails, de matériel, et d’armes bien entendu. Ils se mirent à travailler autour de la Big Boy, aménageant le ballast, la remettant à neuf, faisant des tests de pression, etc. Python supervisait, Mina et moi restions passifs, à regarder. Un jour j’arrivai à prendre Python à part.
« Je nage dans le brouillard, est-ce que tu vas m’expliquer ?
- J’avoue que j’aurais du mal, le brouillard n’est pas assez dense pour que l’on puisse nager dedans.
- Arrête de faire de l’esprit, explique moi qui sont ces types, comment tu les as connu. Tu n’as eu qu’à entrer là bas, claquer des doigts, et voilà.
- Tu connais l’histoire du français, de l’américain et du taliban qui se rencontrent à Bagdad ? me demanda-t-il avec un air tellement sérieux qu’il me fit peur.
- Heu, non… répondis-je désarçonné.
- Et pourtant tu ne fais pas tant d’histoires.
Il esquissa un sourire et commença à s’en aller.
- Explique moi !
- Il y a pas mal de choses que tu ne connais pas à propos de moi. Respecte-les, c’est tout. Cela tient pour mon rapport avec ces hommes, autant que pour mon rapport avec Mina. Je ne te demande pas comment l’habitant d’un abri Vault-Tec se retrouve parmi nous, et encore en vie, alors qu’il aurait mieux fait de rester au chaud avec les siens. »
Je restais abasourdi alors qu’il s’éloignait en donnant des directives.

Après quelques temps, la locomotive fut mise en marche ; à allure plus que réduite, ses cinq cent tonnes pouvant se trouver à jamais embourbés si les rails provisoires ne tenaient pas. Au fur et à mesure de sa progression, on déboulonnait la voie derrière pour la replacer devant. Les gardes pendant ce temps veillaient, mais il ne se passa rien d’inattendu. Jusqu’au jour où, en reconnaissance avec deux de nos techniciens paramilitaires anonymes, j’aperçus des silhouettes sur le ballast, à l’horizon. Les deux autres ne dirent rien, et allèrent voir Python, qui s’adressa à tout le monde le soir même. « Nous avons rejoint l’autre équipe. Nous allons pouvoir avancer plus rapidement, et pousser la loco. Ensuite, nous pourrons enfin commencer ».

En effet, nous arrivâmes à une ligne beaucoup plus stable et à même de supporter l’engin de l’Union Pacific sans risquer de la voir dérailler. Et deux jours après, je pus admirer Alcatraz. Il s’agissait d’une énorme prison, du plus pur style George W. Bush, comme il en avait fait construire à la fin de son second mandat, dont la seconde élection avait été aussi douteuse que la première. C’était un gros bloc de briques brunes de cinq cent mètre de long sur quatre cent de large. Les murs faisaient cinq mètres de haut, et ceux de la seconde enceinte étaient deux fois plus hauts, tous deux surmontés de barbelés. Tous les dix mètres, une case pour gardiens, surmontée de lance roquettes automatiques. Et entre deux case, régulièrement, une double mitrailleuse gatling guidée par détecteur d’infrarouges et à visée laser. A cette époque, les prisons avaient plus à craindre de l’extérieur que de l’intérieur. En effet, les prisonniers, maintenus dans un état physique lamentable, régulièrement fouillés et subissant les maltraitances des gardiens, n’auraient pas pu soulever une révolte sans se faire massacrer par les systèmes de défense internes, pourtant très basiques. Les différentes mafias et gangs, par contre, ayant des moyens de plus en plus impressionnants, devenaient la véritable menace pour ces prisons. Celle que Python avait désignée comme ‘Alcatraz’ avait ses tourelles défensives encore actives, grâce à la centrale nucléaire encore en fonctionnement à l’intérieur du bâtiment. Il fallait en effet que la vie puisse se faire en autarcie pour pouvoir soutenir un siège de plusieurs jours le temps que l’armée réunisse des forces assez importantes pour secourir les mâtons. Il y avait également un champ de mines de dix mètres autour des murs, et les lance-roquettes finissaient de rendre impossible l’approche, même avec un véhicule blindé. Tout ce dispositif expliquait pourquoi le bâtiment n’avait pas été pillé ; il était d’ailleurs en très bon état, ayant été étudié pour résister le mieux possible aux déflagrations même très puissantes. La prise d’un tel château semblait alors impossible, sauf en passant par son talon d’Achille, que Python avait repéré depuis longtemps mais n’avait pu exploiter faute de moyens nécessaires. Il s’agissait de la seconde porte réservée à l’approvisionnement. La première était défendue par un système de pont rétractable et de sas composé de deux portes blindées d’un mètre d’épaisseur, ouvertes chacune un quart d’heure par jour, jamais en même temps, et toujours sous haute protection. L’approvisionnement, par contre, se faisait par voie ferrée. Pour ne pas laisser une entrée béante en permanence, les rails arrivaient jusqu’à une plaque tournante qui soutenait une partie de la muraille et continuaient derrière, mais dans les deux cas, un butoir situé sur la plaque empêchait d’avancer plus loin. Lorsque la locomotive arrivait, après avoir été fouillée de fond en comble par des gardes spéciaux membres de l’armée, la plaque pivotait, entraînant alors les sections de murs qui étaient construits dessus, libérant le passage. Entre les deux murailles, sur la plaque seulement, se trouvait un tronçon de voie. Ainsi, lorsque les deux murs se retrouvaient perpendiculaires à leur place originelle, la voie qu’ils encadraient coïncidait avec les rails extérieurs et formait le tronçon manquant entre dehors et dedans. La locomotive passée, la plaque pivotait à nouveau de quatre-vingt dix degrés, les deux murs reprenaient leur place, en continuation de la double muraille. L’idée de Python était d’utiliser les rails comme voie d’accès, et d’envoyer la locomotive sur les murs, moins épais et moins lourds que sur les autres points. La loco devrait avoir assez d’élan pour enfoncer le butoir, traverser la première muraille, et taper assez violemment la seconde pour faire une ouverture et permettre à un commando d’investir la prison. Une des principales difficultés venaient du fait que, une fois les murs en places, des barres d’aciers s’y inséraient pour empêcher tout mouvement, et également des attaques du type de celle que nous prévoyions. Le choc allait être très violent ; le commando allait devoir y survivre, ce qui demandait une certaine préparation ; si le plan ratait, ils allaient devoir sortir et se feraient sulfater par les mitrailleuses, s’ils ne recevaient pas une roquette. Quoi qu’il en soit, une semaine après, le premier pas fut fait, la dernière roue de l’engrenage fut mise en place, et tout allait se passer, quelle qu’en soit l’issue, sans que nous puissions y faire quoi que ce soit. Plusieurs kilomètres en amont, la Big Boy, en chauffe et sous pression depuis deux jours, fut mise en branle ; elle atteint rapidement sa vitesse de croisière, sans trop de perte de vapeur, preuve que les ingénieurs du groupe Phoenix, dont j’appris le nom plus tard, faisaient du bon travail. La Big Boy parcourut les trois derniers kilomètres en une minute. A quelques centaines de mètres du butoir, la voie explosa soudain. Un dispositif anti-intrusion inconnu, sans doute basée sur la vitesse d’approche du convoi, avait fait son œuvre. Je tournai la tête vers Python, qui, de ses jumelles, regardait la scène horrifié. La locomotive, subissant l’explosion directement sous ses boggies, eût à peine un hoquet. Sur sa lancée, le manque de rails comme appui ne la gêna même pas ; elle continua sa course et vint frapper de plein fouet le butoir qui ne sembla même pas la ralentir. Un instant plus tard, le premier mur d’enceinte, haut de cinq mètres et épais d’un demi, subit le coup d’une masse de cinq cent tonnes projetée à cent cinquante kilomètres/heure. La locomotive sembla pénétrer facilement ; le mur, touché au ventre, se plia légèrement ; le haut de la muraille s’écroula, tandis que, sur les côtés, les murs s’effritèrent, à cause des barres d’aciers peu enclines à se tordre. Le choc, très violent, produit un bruit sourd mais intense, et souleva un nuage de poussière. Une mitrailleuse crépita un instant, puis plus rien. Lorsque la poussière retomba, nous vîmes la locomotive, penchée sur le côté, les roues tordues, ayant à moitié traversé le second mur. C’était un début de victoire. Python eut une communication sur son walkie-talkie ; le chef du commando lui indiquait qu’ils étaient tous sain et sauf et sans trop de contusions ; les dispositifs de sécurité et leur entraînement avaient payés. Il fallait maintenant voir s’ils arriveraient à rentrer dans l’enceinte, puisqu’ils étaient dans le cockpit, à l’arrière de la locomotive. Vingt minutes plus tard, on nous confirma qu’ils avaient réussit. Un des commandos avait été méchamment brûlé, due à une fuite de la chaudière, alors qu’ils étaient passés sous les boggies. Quelques six heures plus tard, la forteresse était à nous. Les commandos, apparemment bien renseignés, avaient désactivés les systèmes de sécurité, et nous avions pu entrer par la porte principale. Depuis, ce bâtiment nouvellement conquis avait été changé en bastion du renouveau.

Rapidement, la prison même, renommée Phoenix Point, en l’honneur du groupe du même nom, avait accueillie de nombreux autres survivants. Des tests étaient faits à leur arrivée, et selon leur degré de radioactivité ou épidémiologique, ils étaient placés en quarantaine et soignés un certain temps. Des drames apparurent malheureusement plus tard, lorsque des gens mis à l’écart depuis des années car incurables se sentirent emprisonnés, mais je n’eus que des échos des révoltes qui suivirent, étant déjà loin. Les membres du groupe Phoenix avaient toujours une garnison sur place pour la sécurité, et une autre pour aller à la recherche de groupes humains pour leur proposer leur protection dans la nouvelle cité. En effet, le nombre de rescapés cherchant refuge chez Python avait contraint à créer une petite ville autour de la prison. On avait désactivé les défenses automatiques et dressé une palissade autour du champ de mine, tous deux pouvant encore servir en cas d’attaque importante, et des habitations se dressaient peu à peu pour recevoir les nouveaux arrivants. A l’extérieur, profitant du fait que la prison avait été construire un peu à l’écart de la ville, laissant de larges terres à disposition, exploitables après un long travail de revalorisation, l’agriculture et l’élevage se développaient. A l’intérieur, on apprenait aux hommes à se battre, aux femmes les principes d’hygiène à inculquer à leur famille, et aux enfants toute la connaissance dont ils auraient besoin le long de leur vie. La prison, le château, était finalement assez peu habité mais très utilisé. Il servirait de refuge en cas de coup dur. Autour du village, une seconde enceinte était petit à petit levée. On protégeait les hommes des hommes, les loups des loups.

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